Le leadership des femmes : Une pierre angulaire de la stabilité familiale et du développement local
Écrit par Jean Baptiste MIRINDI HAMULI - Social Behaviour change Officer, FSP project
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Gisèle, âgée de 39 ans et mère de trois filles, déblaie joyeusement les alentours de son chantier. Impliquée et satisfaite, elle manifeste la joie d'avoir retrouvé son droit de participer au processus de prise de décision dans son foyer. Elle vit dans le territoire de Kalehe où son mari est agro-industriel.
La sixième fille de sa mère, Gisèle a aussi plusieurs demi-frères. La vie allait bien jusqu’à ce que son calvaire commence dans la première année de son mariage. En plus d'autres abus qu'elle a souffert, elle a été exclue de la prise de décision dans les affaires familiales.
"Je n'ai jamais connu de vie heureuse pendant les 19 premières années de mon mariage. Toutes les décisions dans la maison étaient prises par mon mari seul et nous vivions indépendamment l'un de l'autre", explique-t-elle avec regret. Cette triste réalité était source de précarité.
L'éducation de ses enfants en souffrait aussi sous un climat permanent d'instabilité dans le foyer, au point de la discrimination contre certains enfants, surtout les filles. Pour elle, l'égalité des droits et des chances n'était pas respectée pour tous ses enfants. Seuls les garçons bénéficiaient de l'éducation.
"Ma fille aînée a conçu à 17 ans, en grande partie à cause des désaccords dans mon ménage. J'avais les larmes aux yeux du jour au lendemain à cause de cette situation", raconte Gisèle avec tristesse.
En 2019, le couple a bénéficié du déploiement des activités transversales sur le genre et la jeunesse du projet de sécurité alimentaire (FSP)-Enyanya financé par le Bureau d'Assistance Humanitaire de l'USAID (BHA) et mis en œuvre par World Vision. Dans le cadre de celles-ci, les groupes locaux ont appris l'importance de l'attention portée au genre, à la violence sexiste, au leadership des femmes et aux avantages de la prise de décision partagée et de la gestion conjointe des ressources familiales.
Conscient des dégâts de ces dernières années, Symphorien, le mari de Gisèle, regrette tout le temps passé dans l'ignorance et la maltraitance de ceux qui devraient être les plus précieux pour lui –sa femme et ses enfants. "J'étais un délinquant; je considérais ma femme comme sans valeur, mais World Vision a fait de moi un homme sage et responsable", raconte-t-il.
Le récit de Symphorien a été confirmé par le chef du village, Pierre Muhini, qui estime que grâce aux actions et réalisations du couple, les choses se sont améliorées positivement, et leur foyer a évolué. "Le mari était difficile à gérer, mais maintenant ce couple est devenu un modèle dans notre village", explique-t-il.
Gisèle est l'une des femmes qui ont régulièrement suivi les formations sur le genre et dont le mari a compris son importance. "Grâce aux différentes leçons du module genre, qui expliquent les conséquences des normes sociales sur la prise de décision partagée et la gestion commune des ressources, ma vie a changé, et mon mari est devenu un modèle dans notre village", dit-t-elle.
Transformée, son leadership au niveau local l'a conduite à être choisie par ses pairs comme Mama Leader, Présidente de l'Organisation de producteurs OP Twende Mbele (allons de l'avant) ; de l'association locale d'épargne et de crédit du village, Tupendane (aimons-nous les uns les autres), et aussi comme trésorière du Comité Villageois pour le Développement (CVD) du village de Muhongoza, au centre de Kalehe. Elle ne cesse de montrer son enthousiasme dans ces structures soutenues par FSP-Enyanya.
Gisèle est désormais très respectée et appréciée par son mari, qui apprécie et soutient sa participation à l'économie familiale et à la gestion des finances de la famille. "Ma joie est extrême ; mon mari a accepté que j'achète un terrain à mon nom sans qu'il n'intervienne négativement", s'exclame-t-elle avant d'ajouter : "Il n'a plus de doutes quand je garde l'argent, contrairement au passé."
Elle raconte cela avec joie, maintenant qu'elle a un titre foncier du cadastre à son nom.
Gisèle mène désormais une vie stable. Sa famille a mobilisé des fonds pour construire sa maison en matériaux durables, qui est sur le point d'être achevée. Elle encourage les autres ménages à faire de même. "Nous partageons le matériel de genre à l'église et à nos voisins deux fois par mois", révèle-t-elle. Elle est maintenant un agent de changement qu'elle n'aurait jamais imaginé être un jour.
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Le projet de sécurité alimentaire du Sud-Kivu (FSP), connue localement sous le nom d'Enyanya, mis en œuvre par World Vision dans la zone de santé de Kalehe soutient les objectifs stratégiques de l'USAID pour la République démocratique du Congo (RDC) en travaillant avec les ménages, les dirigeants communautaires et le gouvernement de la RDC pour améliorer la sécurité alimentaire et nutritionnelle et le bien-être économique des ménages vulnérables du Sud-Kivu.